Twilight of the Gods

Térence a écrit :Félicitations Toxxiksxkx ! Et merci d'avoir participé

Dormir. Rêver, peut-être...

Une pensée vagabonde. Une idée fugitive. Une course interminable dans un désert mental. Mental ? Je ne le sais plus. Naître, courir, mourir. Le sable ... Le sable est universel, omniscient. Tel le sang coulant dans mes veines, il est si présent que je ne le voie plus. Malgré tout, je le sens. Il pulse. Il vit.

Non. Je n’ai pas le temps. Et plus qu’une question de temps, c’est une question de survie. Je ne peux dormir. Ou du moins, pas sans avoir un oeil ouvert. J’ai l’habitude, après tout ce temps.

Cinq ans, ici, à vivre d’eau croupie et d’asticots, à ne plus savoir ce que le mot “Maison” veut dire. Cinq ans à courir. Je ne sais pas ce qu’ils sont. Tout ce que je sais, c’est qu’ils ont fait des choses ... Terribles. Peut-être les coucherais-je sur ce cahier plus tard. Le seul bien qu’il me reste, hormis mes vêtements, et le crayon.

Je l’ai trouvé dans un ancien coffre, il y a quelques jours ... Ou était-ce il y a quelques heures ? Les heures passées dans ce désert se ressemblent tellement ... La notion du temps semble si abstraite, ridicule, et superficielle dans cet enfer. L’homme se bat contre lui depuis la nuit des temps, mais il devient le moindre des soucis maintenant que je suis ici. Suis-je mort ? Oui, non, peut-être pas. Aucune importance ... De toute façon, je préférerais ne pas me faire attraper par ... eux.

Ils semblent avoir été humains, il y a longtemps ...

J’ai du, hier, arrêter d’écrire, fuyant en hâte au son de ces bêtes. Leurs entrailles, souvent à ciel ouvert, produisent un bruit lorsqu’ils marchent. Un son qui, il y a quelques années, me donnait la nausée. Maintenant que j’y suis familier, il est presque, et paradoxalement, relaxant.

Ce son est bien la seule chose qui me garde en vie : ils ne s’arrêtent jamais, ni pour boire, ni pour manger, ni pour dormir ... Tout ce que je peux faire, c’est les distancer, dormir, les distancer à nouveau, fuyant ce son comme la mort. Le son doux et régulier des organes s’entrechoquant à chaque pas ainsi que le paysage répétitif, voire même inchangé du sable et du ciel tendent à m’endormir. Mais je marche, je cours, je gravis les dunes, car ma survie en dépend. M’arrêter, c’est mourir. Pire, devenir l’un d’eux.

Descendre sur les dunes est mon unique plaisir en ce monde. Glisser, sentir le souffle de l’air sur le joues, avoir l’impression que l’on peut s’envoler. Fermer les yeux quelques instants, et se rappeler. Mon père, ma mère, mes amis. Ils ont traversés le Rubicon et ont pris les armes contre les vivants. Contre moi.

Voilà plusieurs semaines que je n’ai pas écrit. L’envie me manquait. De plus, je souhaite conserver le papier. Le cahier avait beaucoup de feuilles déchirées, et si jamais j’avais continué à ce rythme, je n’aurais pu écrire plus de deux mois avant de manquer de papier. Encore une ressource à gérer. Je me complique les choses, avec ce ... Ce ... Journal.

Que vais-je en faire, de toute façon, une fois qu’il sera plein ? Le jeter ? Le garder jusqu’au dernier moment ? Le cacher, en espérant qu’une civilisation prochaine le trouvera ? A quoi bon ... Je ne sais même pas si des gens sont encore vivants. Peut-être suis-je le dernier.

Parfois, le soir, en regardant les étoiles, j’imagine comment les astronautes ont vécu l’évènement. Combien de temps ont-ils survécu ? A court de nourriture, ont-ils ... Qui sait ce qui passe par la tête de gens désespérés. Et quand ils se sont rendus à l’évidence, qu’ont-ils fait ? Ont-ils attendu en silence, en priant ? En hurlant ? Ont-ils essayé de revenir sur Terre ? Après leur mort, ont-ils été infectés par cette ... Je ne sais même pas si c’est une maladie. Une question aussi vaine que de se demander si Dieu existe, et si il a provoqué cela. Le livre de la révélation nous aura prévenu, nous, occidentaux. L’apocalypse ... Est-ce ce qui nous a frappé ?